"Lorsqu'une intervention à lambeau est indiquée lors du traitement d'une parodontite ou d'une intervention de chirurgie moco-gingivale, l'incision et la suture constituent le premier et le dernier temps de l'acte opératoire et déterminent la plupart du temps la réussite ou l'échec de l'intervention. De ces deux phases, la seconde, les sutures, liées très largement à la première, les incisions, dépendent en effet les objectifs thérapeutiques de l'élévation d'un lambeau tant en chirurgie parodontale qu'en chirurgie muco-gingivale ." Alain Daniel
CAS CLINIQUES
Ils concernent essentiellement des cas de chirurgie muco gingivale visant à corriger des recessions gingivales accompagnées de lésions induites de la muqueuse labiale : le plus souvent des ulcères.
" La récession parodontale ou dénudation radiculaire est définie comme le déplacement de la gencive marginale apicalement à la jonction amélo-cémentaire (American Academy of Periodontlogy, 1992).
Pour Guinard les recessions gingivales ou dénudations radiculaires (ou retraits gingivaux) sont caractérisées par une dénudation partielle de la surface radiculaire par migration apicale de la gencive et bien sûr du desmodonte et de l'os alvéolaire.
La classification la plus simple des récessions est celle de Benque (1983) qui les scinde en trois catégories U,V et I en fonction de leur forme.
Sullivan et Atkins (1968) ont présenté quatre classes de récessions gingivales :
- large et longue
- large et courte
- étroite et longue
- étroite et courte
La classification de Miller (1985) est plus large et plus détaillée pour permettre d'établir le pronostic d'un recouvrement de la récession gingivale par la chirurgie muco-gingivale :
- classe I : récessions gingivales larges ou étroites n'atteigant pas la jonction muco-gingivale, 100% de recouvrement sont possibles
- classe II : récessions gingivales larges ou étroites atteigant ou dépassant la jonction muco-gingivale, sans perte des tissus parodontaux interproximaux, 100% de recouvrement sont possibles.
- classe III : récessions gingivales atteignant ou dépassant la jonction muco-gingivale, avec perte des tissus partodontaux interproximaux, ou avec malposition, le recouvrement ne sera que partiel.
- Classe IV : récessions gingivales atteignant la joncton muco-gingivale, avec perte des tissus parodontaux interproximaux, et avec malpositions, le pronostic de recouvrement est mauvais".
D'aprés J.M Dersot.
Nous envisagerons parmi les techniques destinées au recouvrement les lambeaux déplacés latéralement et les lambeaux déplacés verticalement.Le but de ces lambeaux n'est nullement esthétique mais il vise à contribuer à la cicatrisation et la guérison des ulcères de calque par interposition d'une muqueuse saine.
1) Lambeau de translation verticale (technique de Tarnov) :
- l'indication : les récessions gingivales en regard de la canine par exemple (avec hauteur de gencice attachée suffisante: petite flêche bleue) associée ou non à des ulcères de "calque" (visible ici sous la lèvre en regard de la récession: flêche noire)
- les différentes techniques:
le lambeau pédiculé de translation verticale
Sur ce schéma le résumé d'une des techniques : au dessus de la récession une incision semi lunaire est réalisée en pleine épaisseur en préservant un pedicule mésial et distal. Le lambeau est soulevé à l'élévateur périosté ou au ciseau d'Oshenbein N°1 (et non au bistouri !) puis le lambeau est positionné plus coronairement. Le site receveur est détartré, poli, et lègèrement moradancé :
- c'est la préparation radiculaire chimique ; les surfaces radiculaires exposées par la maladie parodontale, en contact avec le milieu buccal, la plaque bactérienne et le contenu de la poche constituent un obstacle au réattachement ou à l'adhésion de la gencive en raison de la présence de bactéries et d'endotoxines. Le surfacage diminue la charge bactérienne et sans doutes favorise l'accélération du "réattachement" de la gencive sur la dent (JP Houhayoun).
Différents produits de surfaçage ont fait l'objet d'études sur l'animal : EDTA 15 %, acide citrique, acide acétique à 5 %... ces substances pourraient favoriser l'adhésion:
- en décontaminant la surface radiculaire
- en accélérant la cémentogénèse
- en élargissant les tubuli dentinaires comme pour une préparation dentinaire
- en favorisant l'adhésion cellulaire
L'incision semi lunaire avant la dissection et le positionnement du lambeau.
Le lambeau est ensuite maintenu en place par des sutures suivant plusieurs modalités possibles :
- Un seul point en U au vicryl qui embrasse la dent en lingual, noué en vestibulaire; pour éviter la dehiscence les chefs libres sont collés à la couronne.
1° exemple
2° exemple
- Deux points matelassier gencive/muqueuse palatine noués sur la crête.
* si le saignement du site donneur est intempestif il est possible de loger une compresse hémostatique dans le croissant dénudé (voir photo ci dessus).
- les résultats :
Ici un échec : la gencive est revenue vers le site donneur en raison de la force de traction exercée lors de la cicatrisation, la récession est à nouveau visible (on se retrouve dans la situation de départ avec un amandement lésionnel notable). On note que la gencive garde un aspect non inflammatoire et que l'ulcère de calque situé au dessus est en voie de cicatrisation.
Ici un bon résultat : la gencive repositionnée reste en place avec une "pseudo attache solide". On est à 3 semaines aprés la chirurgie, le site donneur n'est pas totalement épithélialisé. L'ulcère est en voie de cicatrisation. La structure histologique de cette attache (et de la nouvelle jonction gingivo-dentaire) n'a pas été étudiée .
- Epithélium jonctionnel long ou attachement conjonctif ?
- Y a t'il eu ou non une migration coronaire de l'attache ?
Autre résultat correct sur un cocker : le site donneur est en voie de s'épithélialiser complètement. Pseudo attache suffisante. Le saignement marginal résulte du détartrage coronaire au collet.
Cas clinique en cours :
Cocker adulte présentant un trés bel ulcère de calque lié à la recession gingivale sur la 24. Présence de tartre et d'une poche vestibualire de 2,5 mm (sonde Periprobe , PeriWin). La canine est trés usée sur sa face distale (souvent le résultat de mauvaises habitudes : usure contre du grillage de clotûre par exemple). Le site receveur est détartré, poli et mordancé avec un etching dentinaire.
La technique retenue est un lambeau de translation verticale avec suture en "U"
2) Lambeau de recouvrement de translation latérale :
Cette canine maxillaire droite de Basset Hound présente une trés belle récession allant au dela de la ligne muco gingivale.
Aprés détartrage la surface radiculaire est polie à la fraîse diabolo puis légèrement mordancée (liquide de mordançage dentinaire) avant la réalisation du lambeau de translation latérale (technique décrite par Grupe et Warren).
L'incision de décharge en pleine épaisseur se situe distalement par rapport à la PM1, elle s'étend au-delà de la jonction muco gingivale. L'élévation du lambeau mucopériosté se poursuit avec le décolleur périosté de Molt. Une incision périostée au bistouri permet une extension plus grande du volet de recouvrement. Avant de suturer nous interposons un greffon conjonctif prélevé au niveau du palais; greffon désépithélialisé avant d'etre enfoui. Sutures à points simples, matelassiers, au vicryl, aiguille ronde. Le site donneur est laissé tel quel en vue d'une épithélialisation spontanée.
3) Lambeau tracté coronairement :
(Sur les conseils de notre confrère Noahaxeltiger)> Date: Sam 12 avril 2008 22:46:46 sur le forum Eugénol.
Caniche de 10 ans avec parodontite généralisée. A hauteur des canines un classique ulcère de calque est nettement visible. Recession gingivale au niveau de la canine, poche peu profonde (2mm) et hauteur de gencive attachée suffisante. Il est entrepris un lambeau tracté coronairement.
Aprés les deux incisions de décharge et le débridement périosté (par incision horizontale) le lambeau peut etre étiré facilement et suturé par points matelassier. Le vicryl utilisé ici est de gros diamètre pour éviter le cisaillement.