Lors de reconstitutions coronaires (difficiles , fragiles et donc plutôt peu pratiquées chez les carnivores) le matériau utilisé outre ses propriétés biologiques souhaitables doit posséder des propriétés mécaniques suffisantes pour résister aux contraintes lors de la mastication (A.Auther).
Lorsqu'une reconstitution doit avant tout etre fonctionnelle, elle fera appel à un matériau métallique : l'amalgame.
Lorsqu'une reconstitution doit avant tout etre esthétique (cas le plus rare dentisterie
vétérinaire ) elle peut faire appel à un matériau organo minéral : les composites ou le verre ionomère.
D
Les composites
On les réservera aux incisives de petits chiens en ménageant une sous occlusion sur la dent reconstruite pour soulager son occlusion et la préserver des chocs .
Les plus adaptés à la dentisterie vétérinaire sont les composites postèrieurs de préférence photopolymérisables mais qui nécessitent l’acquisition d’une lampe .
Les composites ont une contraction en volume et lors de leur durcissement c'est la raison pour laquelle ils doivent être collés aprés une phase de mordançage ou "etching" à l'aide d'acide orthophosphorique à 30% par exemple de façon à cratériser la surface amélaire pour la rendre rétentive.
Sur cet autre schéma le composite (en rose) a été appliqué aprés mordançage de l'émail : le joint est de bonne qualité (rétentions mécaniques)
Sur cette vue agrandie du schéma supérieur la rétention mécanique crée par l'acide sur l'émail aprés 20 secondes environ permet à l'agent de liaison fluide (plus fuide que le composite qui est pâteux) de pénétrer dans les enfractuosités. L'agent de liaison dont la structure chimique est quasi identique au composite va se lier à celui ci (rétention chimique).
Un joint de bonne qualité . Photo Pr Auther . Meb CHU Toulouse
La polymérisation des composites est soit naturelle (composites de 1° génération plus ou moins abandonnés) soit initiée par une lampe halogène : le catalyseur (camphoquinone) étant initié par la lumière bleue.
-résistance à la compression (en Kg/cm2)
*émail : 3000
*dentine :2600
*composite 3000
-dureté
*émail :300
*dentine :98
*composite : 110
-résistance au cisaillement
*émail : 1500
*dentine :600
*composite :600
Collages amélaires
La préparation amélaire
- le biseautage
Le collage est (était) surtout amélaire, il fauf donc augmenter la surface d'émail au contact du composite pour que l'adhésion soit meilleure : c'est le but du biseautage de l'émail. Il est réalisé à la fraise flamme diamentée.
- l'etching
Aprés biseautage la surface amélaire est préparée au scellement par un mordançage au PO4H3 à 30 % (1 mn en moyenne). Cet acide est rincé puis la dent est séchée. Elle est prète à l'application du composite ou de l'agent de liaison.
Application de gel ortho phosphorique sur une incisive pendant sa restauration (à gauche; avec l'aide d'un pivot screw post), sur une canine usée en face distale (grillage) à droite avec l'aide de pins.
Les collages amélo-dentinaires
Les collages actuels sont le plus souvent des collages amélo-dentinaires, c'est à dire que l'adhésion se fait au niveau de l'émail (préparé par un etching pour émail) et au niveau de la dentine (également préparée par un agent de mordançage dentinaire=conditionneur dentinaire) le but étant de réduire le hiatus et d'augmenter l'adhésion. Dans ces conditions l'agent de laison est un adhésif amélo-dentinaire (photoplymérisable) et pas simplement un agent de liaison amélaire.
"Les nouvelles résines fuides des agents de liaison ont tendance à coller à la dentine soit parcequ'un radical phosphorylé chélate l'ion Ca++ soit en raison du conditionneur dentinaire utilisé en plus de l'etching amélaire" (A.Auther).
Deux flacons d'etching : un amélaire à gauche un dentinaire à droite.
Un exemple de flacon d'adhésif amélo-dentinaire: le scochbond
Ci-dessous un coffret de 4° génération avec l'adhésif amélo-dentinaire le primer, et le tube de composite
Ces collages nécessitent plusieurs munipulations : application de l'etching, rinçage, application de primer, de l'agent de liaison et bien sur du composite ( =générations "multiflacons" ). De nouvelles générations permettent de réduire les étapes tout en observant de bonnes propriétés adhésives. Ce type de produits est trés adapté à la dentisterie vétérinaire car il réduit le nombre de spécialités cosmétiques dont il faut disposer et facilite les process pour les praticiens non acoutumés à l'adhésion.
La 6° génération présente l'avantage de supprimer l'étape du mordançage à l'acide orthophosphorique par l'utilisation d'un primer acide. L'adhésif est l'étape suivante.
La 7° génération (iBond) correspond à un adhésif auto mordançant sans rinçage (etching, primer, adhésif en une étape).
1°exemple d'adhésif de 7° génération : Le sytème adhésif iBond et son procédé d'application ci dessous. L'iBond est un agent de liaison monocomposant (photo-ploymérisable) et auto mordançant.
2° exemple : l'adhésif Adefix mono :promoteur d'adhésion-amélo dentinaire monocomposant (principe du collage humide :Wet-bonding)
Un tube de composite pâte photo-polymérisable. Application et modelage à la spatule pour le comblement terminal de la cavité.
Les composites en carpule avec pistolet sont d'une utilisation plus facile.
La finition : polissage
Une reconstitution au composite (venus) aprés polissage sur une carie vestibulaire de classe II .
Les verres ionomères
Le verre ionomère est un matériau associant une poudre (alumino silicates) et un liquide (ac.poly acrylique) plus ou moins visqueux. Certains solvants liquides (ex.AquaCem de Detrey) sont même composés d'eau et ils sont particulièrement intéressants en dentisterie vétérinaire puisque par leur composition aqueuse ils "prennent" même en milieu humide ce qui est le cas la plupart du temps dans la bouche des carnivores (aspiration et digues plutôt rares).
Le verre ionmère Aquacem avec solvant aqueux trés fluide.
Le GC Fuji Ortho LC est un verre ionomère photopolymérisable trés intéressant pour le scellement de brackets.
Les verres ionomères sont esthétiques mais plus fragiles que les composites . Ils résistent mal aux occlusions (surtout celles des chiens !). Comme ils sont composés de silice (comme leur nom l'indique) ils ont une certaine neutralité, et donc inocuité, vis à vis des tissus vivants de la dent (pulpe).I ls sont utilisés chez le chat par exemple pour fermer des fractures de canines récentes et permettent à la fois le coiffage pulpaire et l'obturation puiqu'ils réalisent à la fois le fond de cavité (fond dur) et le comblement de la cavité résiduelle. Ils permettent également de combler les lésions du collet (stade I et II) souvent comparées aux mylolyses chez l'homme à la place des vernis types Copalite. Ces comblements de lésions du collet chez le chat ne retardent malheureusement pas l'évolution du processus odontoclatique qui évolue inexorablement vers la dissection corono-radiculaire.
L'amalgame
Matériau d'origine métallique préparé extemporanément par trituration puis placé dans la cavité prélablement préparée (rétention) à l'aide d'un porte amalgame, foulé et lissé au brunisseur. Les qualités de résistance sont exceptionnelles, l'esthétique est moins agréable que les composites. C'est à notre avis le matériau de comblement de choix pour les obturations des canines et des dents postérieures : obturation stable, immuable de forme, à faible risque d'infiltration.
L'alliage contient du mercure ; il ne peut appliqué que sur une dent dévitalisée (ou aprés une protection pulpaire de trés bonne qualité : fond de cavité à l'hydroxyde de Ca).
Amalgamateur Dentomat : il comporte un réservoir à Hg et un reservoir à alliage (étain, Ag-Cu) , le temps de vibration est réglable, la quantité de produit fini ainsi que la composition du mélange .Les nouvelles normes en matière de protection environnementale (liées à la présence de Hg) imposent aux praticiens des mélanges "standardisés" sous la forme de capsules prédosées ; ils peuvent etre vibrés en utilisant la fonction mécanique du Dentomat mais en y adaptant une fourche souple receptionnant les capsules prédosées (voir photo ci dessous).
Le porte amalgame : deux têtes de diametres différents (en fonction de la taille de la cavité) permettent de charger et de transporter l'amalgame dans la cavité dentaire et de l'y propulser.
Quelques instruments pour la pose d'un amalgame: à droite le porte amalgame, au centre des fouloirs pour "tasser" et compacter l'amalgame, à gauche un brunissoir pour lisser et surfacer pendant le durcissement et donner un aspect brillant et esthétique à la restauration.
Pose d'amalgame sur un croc inférieur gauche de Rottweiller fracturé à la suite de machonnements de barreaux métalliques (les traces de métal sont encore visible sur la face vestibulaire des incisives). Le croc droit avait été fracturé et obturé avec un amalgame deux ans avant. L'amalgame est toujours en place malgré les "secousses "!
Lu dans Dentisfuturis:
Le 21 décembre 2007, le ministre norvégien de l'Environnement annonçait le bannissement de l'utilisation du mercure, y compris dans les amalgames dentaires*, faisant ainsi de la Norvège le premier pays au monde à prendre une telle décision. "Le mercure est parmi les polluants les plus dangereux. De bonnes alternatives au mercure existent déjà et il est donc approprié de mettre en place cette interdiction" déclarait le ministre de l'Environnement, Erik Solheim dans un communiqué.
Une mesure exemplaire
La nouvelle a de quoi réjouir les opposants à l'amalgame dentaire qui se battent depuis des années pour en faire interdire l'emploi. Fin 2007, la Commission européenne envisageait d'éliminer le mercure de toute préparation destinée aux soins et devait se prononcer sur le devenir du mercure en dentisterie. En prenant cette décision radicale, la Norvège va plus loin que l'Union Européenne, dont elle n'est par ailleurs pas membre, et lui adresse un message clair. La mesure exemplaire se veut un signe fort:
"C'est un signal important à l'adresse de l'Union Européenne et des autres pays pour leur dire qu'il existe de bonnes alternatives au mercure" a précisé le ministre norvégien.
Une incitation pour les autres pays
Telle n'est pas la position des autorités françaises qui continuent de défendre l'amalgame au mercure. "Le composite […] ne peut être considéré comme un substitut généralisé à l'amalgame" déclarait un rapport du Sénat d'avril 2001.
Pourtant, la décision de la Norvège qui n'a guère rencontré d'écho médiatique, pourrait bien faire date. En tant que premier pays au monde à prendre une telle mesure, la Norvège pourrait faire des émules. De sources autorisées, la Suède qui limite déjà l'emploi des amalgames depuis 1999, envisagerait de prendre une mesure identique.
La fin programmée de l'amalgame ?
"La mort de l'amalgame est programmée, oui mais pour quand?" écrit P. Colon sur le site de l'ADF (Association Dentaire Française). Les nombreuses controverses sur la nocivité du plombage et les risques par rapport à l'environnement rendent de plus en plus intenable la position de ses défenseurs. S'il est évident que le mercure finira par disparaître de la dentisterie, on peut se demander combien de tonnes devront encore être posées dans la bouche des patients avant que la France et l'Europe ne se prononcent définitivement pour son interdiction. D'après l'ADF, plus de 10 millions d'amalgames sont posés chaque jour dans les pays industrialisés, ce qui équivaut à quelques 15 tonnes de mercure insérées chaque année dans la bouche des français. Souhaitons que des initiatives comme celles de l'Akut, association luxembourgeoise qui lançait en novembre 2007 une pétition, baptisée Appel du Luxembourg, pour faire interdire le plombage, ne hâtent cette fin programmée.
Réponse, peut-être, en 2008.
Dr J.F Gaudy Paris V
Eléments complémentaires de reconstitution :
les moyens de rétention
(les tenons)
a) radiculaires
Fracture de l'incisive mitoyenne supérieure. Tentative de reconstitution aprés pulpectomie avec tenon "scew post" scellé et composite.
Le tenon radiculaire est scellé (Fuji I)
Reconstitution au composite; le screw post dont la teinte dorée est visible sous le composite est camouflé à l'opaquer avant la première couche de composite. Le composite n'atteint pas en incisal le niveau de l'arcade incisive de façon à protéger et à soustraire cette cuspide des contraintes occlusales et des mordus.
Une autre incisive mitoyenne reconstituée en composite.
Une autre technique sur une fracture similaire aurait pu etre utilisée : la couronne céramo métal à pivot (plus onéreux) illustrée par le cas ci-dessous.
Essai de 3 teintes de céramiques avant la pose ! (La 1° céra pour chien du prothésiste : il n'a pas lésiné !!)
Pose de la céramique (mitoyenne du coté droit du cliché) : le ciment de scellement n'a pas été retiré à la jonction corono gingivale.
b) para pulpaires
Les tenons parapulpaires peuvent présenter un interêt lors de reconstitution de dents usées sur leur face distale (ex. chiens usant les canines sur les barreaux de la cage) lorsque il n'est pas possible de tailler de cavité rétentive. Ces petits tenons vissés aprés préparation d'un pré-trou calibré constituent des points d'ancrage qui évitent le glissement de la reconstitution. Ils sont difficiles à utiliser sur dent vivante car il faut éviter la cavité pulpaire (=> à éviter chez les chiens jeunes à grande chambre pulpaire).
Une fois vissé le pins peut etre recourbé pour éviter de faire saillie.
La même dent aprés la pose de composite pour recouvrir les pins.
1° exemple
Quelques pins sur une dent (canine) fracturée et dévitalisée avec pose d'un composite quelques mois avant. Un essai de reconstitution au composite sera tenté sur la face occlusale : ce type de montage est voué à l'échec car, d'une part, en face occlusale un composite en substitution de la cuspide de canine a de trés grande chance d'être rapidement pulvérisé, d'autre part une reconstitution composite en coiffe sur une surface comportant de l'amalgame ne constitue pas un montage orthodoxe sur le plan de la compatibilté des matériaux.
Les pins sont visibles par transparence. La cuspide en composite (trop fragile) va raidement casser. La seule reconstitution possible et viable sur un telle dent aurait été la couronne acier.
2° exemple
Ce type de reconstruction sur tenon acier avec restauration au composite a également trés peu de chance de durer dans le temps car la restauration intéresse la cuspide d'une canine de chien moyen et cette dernière sera continuellement soumise à des contraintes qui entraîneront sa dégradation.